Une question que beaucoup se posent quand ils découvrent le spectre introverti extraverti : sommes-nous nés introvertis ?
Oui, il y a des origines génétiques à l’introversion. Non, cela n’explique pas tout. Et personne n’a un caractère prédéfini à sa naissance par ses gènes.
Mais ces dernières années, la science avance à grands pas. Et Il semble bien que le cerveau des introvertis fonctionne différemment de celui des extravertis.
Nous avons également dit et répété dans les articles précédants que les introvertis rechargent leurs batteries différement des extravertis, eh bien il y a bien une explication biologique à cela.
Aurélie et Sylvain sont-ils nés introverti ?
Sylvain est impatient ! Ce soir, il doit retrouver quelques amis qu’il n’a pas vus depuis bien longtemps. Voilà des jours qu’il en parle à sa femme, Aurélie. Il est vraiment heureux de les revoir, et fier de faire connaître ses amis à sa femme.
L’apéritif commence. Les discussions vont bon train : on se questionne, Sylvain raconte les nouveautés dans sa vie, et questionne les autres sur leurs dernières nouvelles. Il est plein d’enthousiasme. Aurélie discute de tout et de rien avec la femme de l’un des autres amis.
Tous les invités sont maintenant arrivés, on passe à table. Ils sont dix. Sylvain parle avec sa voisine qu’il ne connaît pas, la femme d’un de ses amis invités. Il est toujours enthousiaste. Il s’extasie sur la nourriture et le bon vin, puise dans le fonds de sa mémoire des petites anecdotes, et parle de l’excellent vin qu’il a bu la semaine dernière. Mais soudain, il ne se souvient plus du nom du vin. Zut. Ce n’est pas grave, il passe à autre chose.
Au bout d’un certain temps, il ne sait plus de quoi parler. Ou plutôt, il n’a plus vraiment envie de parler. Alors il écoute, et attend le dessert. Sa voisine continue maintenant la conversation avec quelqu’un d’autre. Sylvain commence à sentir une grande fatigue.
Le dessert est terminé, ils passent tous au canapé, prennent un schnaps pour certains, une tisane pour d’autres. Sylvain est assis confortablement dans un siège profond, et entend un brouhaha de conversations autour de lui. Il essaie de se raccrocher à une conversation près de lui, mais rien à faire, il ne comprend pas l’alignement des mots que ses amis prononcent. Le son de la musique d’ambiance a augmenté, tous parlent à haute voix. Aurélie est ravie. Elle participe à deux conversations à la fois, rie à gorge déployée, transpire le bonheur.
Sylvain disparaît petit à petit. Les autres ne le voient plus. Quelqu’un près de lui s’en rend compte et lui tend une perche : “alors Sylvain, fatigué ? Tu as trop bu ?”. Pris de court Sylvain ne sait quoi répondre. Quinze minutes plus tard ils s’en vont, prétextant qu’une dure journée l’attend le lendemain.
Sylvain ne comprend pas. Il avait tellement envie de les voir, et il en a finalement très peu profité. Sa femme, qui le connaît bien ne dit rien, mais est un peu déçue.
On le voit : 2 manières de fonctionner. Sont-elles innées ?
Vous l’aurez compris, Sylvain est introverti et Aurélie est extravertie. Voyons ce qui s’est passé dans leur cerveau au cours de cette soirée.
Comme vous avez pu le voir, Sylvain est tout à fait sociable. Il a eu un réel plaisir à participer à cette soirée. Mais il s’est passé quelque chose au cours de la soirée qui l’a épuisé rapidement. Aurélie, au contraire, était plutôt sur sa réserve en début de soirée et est devenue de plus en plus enthousiaste au cours de la soirée.
Les mécanismes biologiques innés derrière l’introversion
Voici quelques éléments théoriques pour bien comprendre ce que veut dire introverti.
La dopamine est une molécule qui circule dans notre sang, et dont l’une des propriétés est de nous exciter. A quantité optimale, elle crée un sentiment de bien-être.
Les extravertis seraient peu sensibles à la dopamine. Ils auraient besoin d’une grande quantité de dopamine pour se sentir bien. Les introvertis, s’ils reçoivent une trop grande quantité de dopamine, seraient rapidement submergés et exténués.
Vous connaissez tous l’adrénaline. Les situations inconnues, qui nous font sortir de notre zone de confort nous font produire de l’adrénaline. Et comme par hasard, l’adrénaline favorise la création de dopamine.
Donc trop d’excitation, trop d’adrénaline, trop de dopamine. L’extraverti se sent bien, amasse de l’énergie ; l’introverti est rapidement exténué. Sylvain, au début excité par la nouveauté, est rapidement submergé et n’a plus qu’une envie : quitter cet endroit pour revenir au calme et faire baisser son taux de dopamine. Aurélie, au contraire, est de plus en plus excitée, elle se sent tellement bien avec ce fort taux de dopamine dans son sang ! Elle n’a pas envie de revenir à la maison où tout redescendra vers un niveau tellement ennuyeux. Sylvain et Aurélie recherchent naturellement leur niveau d’excitation optimum, qui est très différent chez l’un et chez l’autre.
Le plus fort de tout c’est que des chercheur ont montré que la création de dopamine est influencée par un gène (le D4DR) qui serait beaucoup plus long chez les extravertis que les introvertis… Il y aurait donc vraiment une origine génétique à l’introversion.
Voilà pour la dopamine.
Mais il y a aussi des choses qui se passent au niveau de notre cerveau. Les chemins physiques empruntés dans le cerveau sont différents chez les introvertis et les extravertis.
Les extravertis, pour avoir plus de dopamine, cherchent constamment à produire de l’adrénaline.
Les introvertis, pour limiter leur quantité de dopamine, ont une autre arme : l’acétylcholine. Cette molécule serait responsable de comportements tels que le calme, l’apprentissage, l’observation, la mémoire à long terme.
Or, dans notre cerveau, l’acétylcholine préférée des introvertis emprunte un chemin long : cela passe par des régions du cerveau de mémoire, de planification, de réflexion.
La dopamine préférée des extravertis va droit au but : information – action. Lorsque Sylvain commence à fatiguer de la soirée, probablement fatigue-t-il de son niveau de dopamine et cherche-t-il à freiner son excitation grâce à l’acétylcholine. Il se recentre sur lui-même, n’arrive plus à faire appel à sa mémoire à court terme (le nom du vin qu’il a bu il y a quelques jours !), et s’isole des discussions alentour qui le fatiguent.
Vous savez peut-être aussi que nous avons tous un système sympathique, responsable du réflexe “attaque ou cours vite” et un système parasympathique qui nous permet de prendre du recul, de réfléchir, etc. Chaque être humain aurait un point de repos idéal situé quelque part entre ces deux systèmes.
Les introvertis auraient un système parasympatique plus développé et se donc se sentent mieux dans la réflexion et le calme, les extravertis un système sympathique plus développé et donc se sentent mieux dans l’action.
Pour conclure : l’introversion serait en partie innée
Je ne rentre pas plus dans les détails. C’est un peu technique, mais vous l’aurez compris, introvertis et extravertis fonctionnent différemment, et c’est en partie donné dès la naissance. Il commence à y avoir de nombreuses preuves scientifiques à une origine biologique et probablement en grande partie génétique de l’introversion. Nous sommes donc bien nés introvertis, au moins en partie. On peut probablement influer sur le tempérament tout au long de sa vie, mais vous ne ferez jamais un bout en train total d’une personne née introvertie.
Si vous voulez en savoir plus, je vous invite à lire le merveilleux livre de Marti Olsen Laney, “Introverti et heureux”, dont je m’inspire principalement dans cet article.